Les États-Unis ont annoncé, ce jeudi 20 février, des sanctions contre le général rwandais à la retraite James Kabarebe et Laurence Kanyuka, porte-parole de la rébellion du M23. Les deux hommes ont été ajoutés à la liste noire du Bureau de contrôle des avoirs étrangers (OFAC) en raison de leur implication dans les activités de la rébellion dans l’est de la République démocratique du Congo (RDC).
Washington hausse le ton
Le sous-secrétaire par intérim du Trésor chargé du terrorisme et du renseignement financier, Bradley T. Smith, a souligné la détermination des États-Unis à sanctionner ceux qui alimentent l’instabilité dans la région. « L’action d’aujourd’hui souligne notre intention de demander des comptes aux responsables et dirigeants clés comme Kabarebe et Kanyuka, qui permettent les activités déstabilisatrices des RDF et du M23 dans l’est de la RDC », a-t-il déclaré.
Les États-Unis réitèrent ainsi leur engagement en faveur d’une résolution pacifique du conflit qui ravage l’est de la RDC depuis des années.
Pression diplomatique accrue sur Kigali
Mercredi, lors d’une session du Conseil de sécurité de l’ONU sur la crise en RDC, la ministre congolaise des Affaires étrangères, Thérèse Wagner, a une nouvelle fois dénoncé l’implication du Rwanda et exigé des sanctions ciblées contre les officiers rwandais et les décideurs politiques responsables de l’agression.
« Le Conseil de sécurité doit imposer des sanctions ciblées, notamment des gels d’avoir et des interdictions de voyager pour la structure de commandement des forces de défense rwandaises, ainsi que les décideurs politiques qui sont responsables de cette agression, y compris ceux qui prétendent ne pas savoir où se trouvent leurs propres troupes », a plaidé la cheffe de la diplomatie congolaise.
Les États-Unis ont immédiatement exprimé leur soutien à ces sanctions, dénonçant la persistance des attaques du M23 malgré les appels au cessez-le-feu.
« Nous avons constamment vu le Rwanda et le M23 ignorer le cessez-le-feu et conquérir des territoires sous de faux prétextes. Nous avons vu le M23 semer le chaos contre les civils dans les milieux de Masisi, Goma et Bukavu. Les États-Unis condamnent fermement la prise de l’aéroport de Kavumu et Bukavu par le M23 et les forces rwandaises. Une fois de plus, nous demandons au M23 de mettre fin à l’offensive et de se retirer des territoires qu’il contrôle », a déclaré la représentante des États-Unis auprès de l’ONU.
Des preuves accablantes contre Kabarebe
Les sanctions américaines à l’encontre de James Kabarebe s’appuient sur un rapport publié en juin 2023 par le Groupe d’experts des Nations unies. Ce document établit clairement le rôle central joué par le général Kabarebe dans la guerre menée par le M23 en RDC.
Le rapport, qui s’appuie sur des sources multiples, notamment deux agents de renseignements, un officier rwandais, trois chercheurs et des services de renseignement étrangers, révèle que les opérations militaires au Nord-Kivu ont été conçues et coordonnées par James Kabarebe, qui occupe actuellement le poste de conseiller en matière de défense et de sécurité du président rwandais Paul Kagame.
Selon le rapport onusien, Kabarebe a bénéficié du soutien de plusieurs officiers rwandais de haut rang, parmi lesquels le général Jean Bosco Kazura, le général de corps d’armée Mubarakh Muganga, le général de division Franck Mugambage, le général de division Vincent Nyakarundi, le général de division Ruki Karusisi, le général de division Eric Murokore et le général de brigade Rugumyangabo Gacinya. Ces responsables militaires et agents de sécurité auraient travaillé de manière coordonnée pour conquérir des territoires en RDC.
Un tournant dans la crise ?
Les sanctions américaines contre Kabarebe et Kanyuka marquent un durcissement de la position de Washington face à la crise sécuritaire dans l’est de la RDC. Alors que les appels au dialogue n’ont jusqu’ici pas freiné l’avancée du M23, cette décision pourrait inciter d’autres puissances occidentales à emboîter le pas aux États-Unis.
Toutefois, il reste à voir si ces sanctions auront un effet dissuasif sur le terrain ou si elles pousseront Kigali et le M23 à revoir leur stratégie militaire. Pour l’instant, la situation demeure tendue dans l’est de la RDC, où les affrontements se poursuivent entre les forces congolaises et les rebelles du M23.